Interview de l'éditeur IMHO avant son lancement. IMHO fait partie des nouveaux arrivants dans le monde du manga, mais celui ci est différent... Pourquoi ? De part ses choix éditoriaux! (J’ai déjà dit ça tiens ^^)
Pourriez-vous nous présenter votre politique éditoriale ?
Si nos premières publications sont dans un premier temps des mangas, IMHO n'est pas pour autant un éditeur spécialisé ni de bandes dessinées japonaises, ni de bandes dessinées tout court. Nous prévoyons dès la première année d'éditer des ouvrages sur le cinéma, ainsi qu'un livre sur l'histoire de la robotique en attendant une exposition photo pour tout début 2005. (Et si tout se passe bien quelques disques de musique électronique !). IMHO est né d'une envie simple : aujourd'hui en France, aucun projet véritablement cohérent d'édition transversale n'existe, chacun des éditeurs se spécialisant dans un genre particulier. Ce que nous souhaitons, c'est donc avant tout créer une plate-forme éditoriale ouverte sur tous les champs de création artistique, capable d'organiser des rencontres entre les différentes disciplines esthétiques et de prendre position par rapport à la production culturelle contemporaine. Un constat que l'on retrouve déjà chez de nombreux artistes qui ne se limitent plus à un seul médium: ils explorent plusieurs domaines, et écrivent aussi bien pour le jeu vidéo que pour la bande dessinée, le cinéma ou la télévision... Concernant les mangas, la politique éditoriale est là aussi très claire : uniquement des titres adultes. Tout simplement parce que hors les shônen et shôjo classiques disponibles partout en France, il est difficile de trouver des titres destinés à un public plus âgé ou plus adulte, qui abordent des problèmes différents des éternels récits d'initiation et autres questionnements adolescents. Dans tous les cas, nous privilégierons les titres originaux graphiquement et scénaristiquement (pour la plupart des histoires complètes en un seul volume), doté d'une identité et d'une personnalité très fortes.
Le nombre de titres publiés par mois a augmenté de près de 40% en 1 an, ne pensez-vous pas arriver trop tard ? N’avez-vous pas peur de la saturation du marché que tant de fans redoutent ?
Tout dépend comment les éditeurs réagiront. S'ils se limitent à sortir le dix-millième clone de Kenshin ou de Card Captor Sakura, ou le énième shônen mille fois rebattus, forcément, il y aura saturation car les lecteurs n'auront guère le choix et se lasseront. Au contraire, si le manga trouve véritablement sa place dans le monde de l'édition française, il y aura matière à des choix éditoriaux beaucoup plus audacieux comme ont pu le commencer les Éditions Delcourt avec Akata. L'idée n'est pas bien sûr de déverser en France tous les mangas sortis au Japon. Cela n'a aucun intérêt. Le projet serait plutôt de donner accès au lecteur à des titres ou à des genres de bandes dessinées qui n'ont pas encore été tentées en France pour des raisons X ou Y.
En tant que nouvel éditeur, que pensez-vous apporter de plus que vos concurrents déjà implantés sur ce marché ?
L'originalité et la force des titres. Par exemple, le premier livre à paraître (Cinderalla de Junko Mizuno, en mars 2004 si tout se passe bien) revisite à sa manière Cendrillon. Les dessins sont un mélange étrange et très décalé entre Super Nana et Hello Kitty, mais le tout sous acide, l'auteur avouant un amour immodéré pour le mignon étrange, et un goût prononcé pour les situations un rien morbides. Pour les titres suivants, il s'agit plutôt de mangas d'horreur violents et macabres, très noirs.
Comment choisissez-vous les titres que vous décidez d'éditer ?
En ce qu'ils représentent un aspect particulier et novateur dans leur domaine. Dans leur manière aussi d'aborder leur champ artistique et les propositions qui en résultent. Et surtout par le plaisir qu'ils me procurent à leur lecture !
Pensez-vous que la prépublication soit viable en francophonie actuellement ? (Shônen collection, Tokebi mag et maintenant Magnolia)
Viable économiquement ou éditorialement ? Même si la qualité n'était toujours pas au rendez-vous, j'aime bien l'idée de Coyote Mag d'offrir à de jeunes dessinateurs l'opportunité de faire leur preuves en situation réelle.
Que pensez-vous de l'exigence de respect du sens de lecture original, de l'utilisation de la couverture originale et du problème des onomatopées qui sont autant d'exigences des fans envers les versions francophones ?
Pour ce qui est de la couverture, je n'y accorde aucune importance pourvu qu'elle soit belle ! Pour le respect du sens de lecture original et les onomatopées, tout dépend de l'auteur. Par exemple sur Cinderalla, Junko Mizuno n'aimait pas du tout l'édition japonaise qu'elle trouvait trop propre par rapport à son histoire (beau papier blanc, couverture stylisée, et couleurs léchées). Du coup, elle a décidé de retravailler tous ses dessins pour l'édition américaine, a choisi ses propres couleurs, et a exigé un papier de mauvaise qualité, un peu jaunâtre pour jouer sur les effets de transparence entre les pages. Elle a aussi recréé toutes les onomatopées, ce qui a demandé un travail considérable. Pour l'édition française, elle a demandé exactement la même chose: sens de lecture occidental, papier de moins bonne qualité. Mais il s'agit à vrai dire d'une situation assez exceptionnelle où l'auteur a eu le temps de travailler sur l'édition internationale de ses œuvres.
La demande pour les mangas de type « seinen » augmente, prévoyez vous de satisfaire ce public ?
Pourquoi pas. Tout dépend des titres.
Quel est votre programme pour l'année à venir ?
Aujourd'hui, un seul livre est prévu : Cinderalla en mars 2004, puis un livre tous les deux-trois mois (toujours des histoires complètes). A priori, il y aura les autres oeuvres de Junko Mizuno : Hansel & Gretel, puis La Petite Sirène. Le reste est encore secret !